Culture / Feux de Marguerite Yourcenar

Feux • Marguerite Yourcenar • 1936

Feux est une suite de nouvelles, de proses lyriques, presque de poèmes, inspirés par une certaine notion de l’amour. Alternant avec des notes sur la passion amoureuse, on y trouve les histoires de Phèdre, d’Achille, de Patrocle, d’Antigone, de Léna, de Marie-Madeleine, de Phédon, de Clytemnestre, de Sappho. « Dans Feux, où je croyais ne faire que glorifier un amour très concret, ou peut-être exorciser celui-ci, écrit l’auteur, l’idôlatrie de l’être aimé s’associe très visiblement à des passions plus abstraites, mais non moins intenses, qui prévalent parfois sur l’obsession sentimentale et charnelle : dans Antigone ou Le choix, le choix d’Antigone est la justice ; dans Phédon ou Le vertige, le vertige est celui de la connaissance ; dans Marie-Madeleine ou Le salut, le salut est Dieu. Il n’y a pas là sublimation, comme le veut une formule décidément malheureuse et insultante pour la chair elle-même, mais perception obscure que l’amour pour une personne donnée, si poignant, n’est souvent qu’un bel accident passager, moins réel en un sens que des prédispositions et les choix qui l’antidatent et qui lui survivront ».

Marguerite Yourcenar est une auteur que j’avais lue alors que j’étais adolescente, mais cela n’a pas été un franc succès. Cependant, comme Zola ou Balzac, elle fait partie de ces auteurs que j’avais envie de relire plus tard.

J’ai voulu retenter l’aventure avec ce recueil de courts textes autour de la mythologie grecque. Malheureusement, malgré tout l’intérêt que je porte à ce sujet, cette lecture s’est révélée houleuse. Je n’ai pas du tout réussi à me plonger dans ces textes. Ce n’est pas tant le sujet de ces derniers qui m’a déplu. À travers des figures mythologiques et historiques, Marguerite Yourcenar écrit à propos de l’amour et de la passion, de leurs violences. Elle se met à leur place. J’ai beaucoup aimé les interludes poétiques entre chaque texte plus long. Ils m’ont plus parlé et touché.

Au contraire, les textes plus longs m’ont quelque peu laissé sur la paille. J’en suis restée totalement hermétique, notamment à cause du style de l’auteur. Il y a plusieurs adjectifs qui me viennent à l’esprit pour parler de cette plume : lourde, prétentieuse et trop intellectualisée à mon goût. De ce fait, ces textes perdent en spontanéité. Certes, Marguerite Yourcenar montre sa connaissance de la mythologie grecque, des mouvements littéraires et artistique de son époque. Mais, du coup, le texte perd de sa force à trop vouloir.

Je suis passée totalement à côté de ce court recueil de nouvelles. Marguerite Yourcenar est définitivement une auteur avec laquelle j’ai énormément de mal, même quelques années après ma lecture.

Culture / Un an avec Audible

En février dernier, après avoir été conseillée et encouragée par une très bonne amie, j’ai craqué pour un abonnement Audible. Ce n’était pas gagné, car j’étais vraiment sceptique au début. Finalement, mon premier essai m’a plutôt convaincu.

Audible est une application qui donne accès à une bibliothèque de livres audio. L’abonnement mensuel coûte 9,95 euros et offre la possibilité de télécharger également des ouvrages gratuitement. Personnellement, ce n’est pas un abonnement que je trouve contraignant et il peut être arrêté à tout moment.

Mes freins aux livres audios

Attrait du papier : j’apprécie encore le papier, le fait de tourner les pages et de pouvoir en annoter certains. En effet, je surligne souvent mes livres ou mets des commentaires, surtout pour les essais que je lis. D’où le fait également que j’en lis très peu sur liseuse.

Peur de manquer de concentration : je n’ai plus l’habitude qu’on me lise des histoires et j’avais vraiment peur de ne pas être totalement plongée dans l’intrigue, de laisser mon esprit vagabondé ou de faire autre chose en même temps.


Cependant, dès ma première écoute, j’ai été conquise et je n’y ai vu que des avantages. J’ai continué mon abonnement depuis et cela fait désormais un an.

Avantages à la lecture audio

Pour les voyages : je voyage énormément. Malheureusement, je suis sujette au mal des transports… Impossible de lire un livre physique ou sur liseuse. Je conduis beaucoup également. Je perds donc pas mal de temps à ne rien faire durant mes trajets. J’ai essayé le livre audio pour la première fois lors d’un court voyage en bus et je l’ai terminé lors d’un long voyage en voiture où j’étais derrière le volant. C’était parfait. En effet, je suis dans les bonnes dispositions : j’avais du temps devant moi et personne pour me déranger. Je n’ai littéralement que ça à faire.

Pour une nuit d’insomnie : cela a changé un peu mes habitudes dans ce domaine, dans un bon sens. Avant, j’allumais la lumière et me replongeais dans un livre, cassant l’atmosphère propice à l’endormissement alors qu’avec un livre audio, je peux rester dans le noir. Cela me berce de me faire raconter une histoire. Certains lecteurs sont très talentueux.

Des livres VO très récents : la bibliothèque est très complète et elle me convient parfaitement. Je recherchais surtout des livres en anglais récemment publiés. Ce qui est le cas et j’ai été plus que ravie. J’ai pu découvrir des sorties récentes que j’avais envie de lire, mais pas forcément d’avoir une copie physique.

Inconvénients

Parfois des petits soucis d’attention : je n’ai pas toujours 100 % de mon attention sur le livre audio. Il y a parfois des moments où mon esprit dévie vers d’autres sujets. Avec le livre physique, il est plus facile de créer une bulle, un moment à soi où la concentration est optimale. J’ai encore du mal à créer cela avec un livre audio, à part pour des trajets en voiture.

Pas d’essais : j’ai testé tout de même des essais en audio et ça n’a pas du tout réussi. J’aime encore trop le papier, réagir au texte. J’ai eu du mal à me l’approprier. Ce n’est pas du tout la manière dont j’apprécie de lire ce type d’ouvrages. J’en ai peu écouté et je ne recherche pas à prolonger cette expérience.

L’importance du narrateur : parmi les livres que j’ai écoutés, la qualité du narrateur était variable. Je me suis rendue compte que ce dernier était déterminant dans mon appréciation du livre. Certains étaient absolument incroyables, d’autres ne mettaient pas en valeur l’ouvrage… J’écoute toujours un extrait avant de me décider à utiliser un de mes crédits.


Livres écoutés en un an

Culture / Mini-chroniques #3. Spécial 2022, Première partie

The left-handed booksellers of London • Gareth Nix • 2020

In a slightly alternate London in 1983, Susan Arkshaw is looking for her father, a man she has never met. Crime boss Frank Thringley might be able to help her, but Susan doesn’t get time to ask Frank any questions before he is turned to dust by the prick of a silver hatpin in the hands of the outrageously attractive Merlin.

Merlin is a young left-handed bookseller (one of the fighting ones), who with the right-handed booksellers (the intellectual ones), are an extended family of magical beings who police the mythic and legendary Old World when it intrudes on the modern world, in addition to running several bookshops.

Susan’s search for her father begins with her mother’s possibly misremembered or misspelt surnames, a reading room ticket, and a silver cigarette case engraved with something that might be a coat of arms.

Merlin has a quest of his own, to find the Old World entity who used ordinary criminals to kill his mother. As he and his sister, the right-handed bookseller Vivien, tread in the path of a botched or covered-up police investigation from years past, they find this quest strangely overlaps with Susan’s. Who or what was her father? Susan, Merlin, and Vivien must find out, as the Old World erupts dangerously into the New.


J’ai beaucoup aimé ce roman fantastique qui m’a quelque peu rappelé la série de Ben Aaronovitch que j’adore. La ville de Londres semble être un personnage à part entière et cet humour britannique dont je raffole est également présent dans ce premier tome plein de promesses. Garth Nix a une imagination débordante, il crée un univers fait de monstres et de magie. J’ai adoré aussi l’apport de ces libraires un peu particuliers. Le monde des livres s’y prête à merveille. Rien que pour ça, j’ai vraiment adoré le roman.

Il est bourré d’actions dès les premières pages. Tout comme le personnage principal, le lecteur est plongé dans le quotidien de ces librairies et en apprend progressivement les us et coutumes, grâce à Merlin. J’ai adoré ce personnage haut en couleur et attachant. Il a un sacré sens de l’humour également. Son dynamisme est en phase avec les rebondissements du roman qui m’ont tenu en haleine. Je l’ai dévoré d’un bout à l’autre et je lirai avec plaisir le deuxième tome.

All of us villains • Amanda Foody & Christine Lynn Herman • 2021

Every generation, at the coming of the Blood Moon, seven families in the remote city of Ilvernath each name a champion to compete in a tournament to the death.

The prize? Exclusive control over a secret wellspring of high magick, the most powerful resource in the world―one thought long depleted.

But this year a scandalous tell-all book has exposed the tournament and thrust the seven new champions into the worldwide spotlight. The book also granted them valuable information previous champions never had―insight into the other families’ strategies, secrets, and weaknesses. And most important, it gave them a choice: accept their fate or rewrite their legacy.

Either way, this is a story that must be penned in blood.


Il y a du bon et du mauvais dans ce roman, mais, malheureusement, les points négatifs ont pris le dessus à la fin. Je ne l’ai pas terminé alors qu’il y avait du potentiel, notamment au niveau de l’univers. Certes, il se rapproche quelque peu d’une intrigue à la Hunger Games avec des compétiteurs qui vont devoir quasiment s’entretuer pour un prix ultime. La magie est omniprésente et j’ai aimé cet aspect-là du livre. Cependant, l’action est bien trop longue à se mettre en place. Le tournoi se fait attendre et quelques longueurs apparaissent.

Les personnages sont plutôt ennuyeux. Celui qui a été, à la rigueur, le plus intéressant, était Gavin. Il se rapproche le plus de cette idée de vilain. Il ne recule devant rien pour atteindre ses objectifs, même à maudire autrui. À côté de lui, il y a trois personnages principaux fades et ennuyeux. Le ratio n’est pas bon ! Je m’attendais à plus de noirceur.

Emma • Jane Austen • 1815

Emma Woodhouse, jeune fille « belle, intelligente, riche, disposant d’une demeure confortable et dotée d’une heureuse nature » n’a jamais été amoureuse, elle revendique hautement le célibat, mais elle adore marier les autres. On pressent, dès le début du cinquième roman de Jane Austen, l’argument d’une comédie délectable.

Il y a des dizaines d’intrigues dans Emma : celles qu’elle invente, celles qu’elle fomente, celles qui existent et qu’elle ne voit pas, celles qu’elle contrecarre, celles qu’on lui suggère. Partant d’un groupe limité de jeunes gens, le roman parcourt l’ensemble des couples possibles selon une logique combinatoire assez comique qui évoquerait presque l’arbre des probabilités.


Je m’étais fixée comme objectif en 2022 de lire tous les Jane Austen… Objectif qui n’a pas été atteint, car les trois que j’ai lus ont été compliqués et je n’ai pas été convaincue par les histoires et les personnages, même pour Emma. Elle a été insupportable à suivre. La fin se sait dès le début… Ce n’est pas une lecture qui m’a enchanté. L’adaptation cinématographique avec Anya Taylor-Jones dans le rôle principal se laisse regarder, mais je l’ai plutôt trouvé réussi par son esthétique ultra léchée.

L’Europe est-elle née au Moyen Âge ? • Jacques Le Goff • 1964

L’Europe contemporaine est une longue histoire qui commence avant la venue du christianisme, et se continue avec son reflux. À l’œil qui sait voir apparaissent des traces, strates successives de nombreuses mutations, depuis les ruines de l’Empire romain jusqu’aux découvertes du XVIe siècle. L’historien les met au jour, les explore, pour montrer combien l’Europe contemporaine hérite, emprunte, reprend bien des caractères de cette «Europe» médiévale qui n’est pas tout à fait la nôtre, mais représente un moment important dans sa constitution : unité potentielle et diversité fondamentale, métissage des populations, divisions et oppositions Ouest-Est/Sud-Nord, primat unificateur de la culture. De l’échec carolingien à la «belle» Europe des villes et des universités, Jacques Le Goff nous entraîne dans un intense voyage à rebours, dans l’espoir que, comprenant mieux leur provenance, les Européens construisent mieux leur avenir.


Parmi les auteurs d’essais historiques que j’apprécie énormément, il y a Jacques Le Goff. Il écrit beaucoup autour du Moyen Âge dans un style accessible à tous. J’en ai lu plusieurs de lui, à la fois pour les adultes et les enfants. Celui-ci est une relecture, l’ayant étudié alors que j’étais en droit. J’avais oublié certains de ses arguments et le livre est tout aussi passionnant à lire des années après. L’idée de départ est de montrer que l’Europe telle que nous la connaissons a des racines qui remontent à l’époque médiévale. Les chapitres sont chrono-thématiques, donnant une certaine clarté aux propos de l’auteur et pour le lecteur, en montrant ainsi les évolutions.

The Son & Heir • Alexander Münninghoff •

What can a son say upon discovering that his father wore a Nazi uniform? Reporter Alexander Münninghoff was only 4 when he found this mortifying relic from his father’s recent past in his attic. This shameful memento came to symbolize not only his father’s tragically misguided allegiance but also a shattered marriage and ultimately the unconscionable separation of a mother and son.

In this revelatory memoir, the author confronts his parents’ complex past as he reconstructs the fortunes and disillusions of an entire family upheaved during the changes of 20th century Europe. The Münninghoffs were driven by greed, rebellion, and rage. An embattled dynasty, they were torn between the right and the wrong side of history. Their saga haunted Alexander’s life for the next 70 years.


J’ai retenté l’aventure des autobiographies/mémoires en me disant que le sujet de ce dernier ne pouvait que me plaire : une famille déchirée par la Seconde Guerre mondiale et qui doit choisir son camp. Cependant, je n’ai pas réussi à me plonger dedans, à ressentir de l’empathie pour l’auteur et les événements qui ont plus ou moins bousculé sa vie. J’ai trouvé le grand-père être le plus attachant de tous, malgré ses défauts. Le père est détestable à souhait et il est frustrant de voir qu’il n’a souffert aucune conséquence d’aucune conséquence de son implication dans la SS.

Ce qui a le plus freiné ma lecture est la manière dont cette autobiographie est écrite. L’impression d’être dans l’intimité de la famille est le propre de ce genre, mais j’ai eu le sentiment que l’auteur parlait de faits et de personnes comme si je savais de qui ou de quoi il parlait… Ce n’était pas le cas. J’ai été souvent perdue par l’introduction de nouveaux protagonistes, des passages plus romancés…

Culture / Demian de Hermann Hesse

Demian • Hermann Hesse • 1919

Roman d’initiation et de formation, Demian est l’un des chefs-d’œuvre de ce genre littéraire. Comment l’homme peut-il échapper au monde des miroirs et parvenir à être lui-même ? Demian (au nom proche du daïmon grec, la voix intérieure) enseigne au jeune Emile Sinclair à ne pas suivre l’exemple de ses parents, à se révolter pour se trouver, à traverser le chaos pour mériter l’accomplissement de sa destinée propre. Au bout de ce chemin où le divin et le démoniaque se mêlent, la crainte d’être un exilé, un séparé, un étranger est annihilée. Il n’est pas d’autre mesure à l’humain que la liberté.

Mon deuxième Hermann Hesse et sûrement mon dernier. Demian est loin de m’avoir convaincu. Cette lecture a été pénible. Je n’ai pas été sensible à la plume et à la pensée de l’auteur. Roman initiatique publié en 1919, il connaît un succès immédiat auprès d’un public relativement jeune. L’auteur y raconte sa découverte de la psychanalyse alors qu’il traversait une grave crise existentielle.

J’y ai vu beaucoup de mysticisme avec une bonne dose de manichéisme. Le monde est vu sous l’angle de la lumière, du spirituel et du mal, avec de la violence. Il ne semble pas avoir de juste-milieu entre les deux. Je pense que pour apprécier pleinement cet ouvrage et tous les tenants et aboutissements de monologues et digressions, il faut connaître la pensée et les symboles de la psychanalyse de Carl Jung… Ce n’est mon cas. C’était long, ennuyeux et bien souvent incompréhensible. Demian a été, pour moi, typiquement le livre reflétant une masturbation intellectuelle autocentrée.

Pourtant, le premier chapitre était intéressant. Le personnage principal, alter-ego de Hermann Hesse, subit les pressions d’un autre garçon qui le harcèle alors qu’il essaie d’être un bon fils, respectueux et obéissant. Le lecteur et ce dernier font la connaissance de Max Demian. Ce dernier se révèle tout de suite être un adolescent fascinant et j’ai vitre compris le pouvoir d’attraction qu’il peut exercer sur Émile Sinclair. Ce dernier est, en revanche, un être naïf et facilement impressionnable auquel je ne me suis pas attachée.

Après Siddharta, Demian se révèle être un autre livre de l’auteur que j’ai détesté. Je pense qu’il sera très vite oublié… J’avais oublié avoir lu Siddharta l’année dernière… Hermann Hesse est définitivement un auteur allemand qui n’est pas fait pour moi.

Culture / Thème 2022 • Les feuilles allemandes

L’année dernière, j’ai participé avec plaisir à la troisième édition du mois dédié à la littérature allemande chez Et si on bouquinait et Livr’Escapades. Durant le mois de novembre, l’objectif est de lire un ou plusieurs romans d’auteurs d’expression allemande (Allemagne, Autriche et Suisse alémanique). Tous les genres et les époques sont acceptés.

J’avais déjà participé l’année dernière où j’ai pu lire Babylon Berlin de Volker Kutscher (policier historique se déroulant dans le Berlin des années 1920) et Le Voyageur d’Ulrich Alexander Boschwitz (roman autobiographique).

Je prévois de lire ces romans durant le mois.

  • La Villa aux étoffes d’Anne Jacobs
  • Les Filles de la Villa aux étoffes d’Anne Jacobs
  • Les exfiltrés de Berlin de Harald Gilbers
  • La fabrique des salauds de Chris Kraus
  • Grand Hotel de Vicki Baum
  • Comment Hitler a acheté les Allemands de Götz Aly
  • Vanishing in the sky d’Annette L. Binder
  • Marlène de Hanni Münzer
  • Son & Heir: A Memoir d’Alexander Münninghoff
  • Demian de Hermann Hess

Culture / Mansfield Park de Jane Austen

Mansfield Park • Jane Austen • 1814

Sans richesse ni éducation, la jeune Fanny Price n’a rien pour séduire la bonne société anglaise. Pourtant, dans la faste demeure de Mansfield Park où l’a recueillie son oncle, il lui faut faire bonne figure. Entre frustrations et vexations, que sera-t-elle prête à sacrifier pour être acceptée dans le monde enjôleur de ses cousins ? 

J’avais pour objectif, en 2022, de lire les romans de Jane Austen. En effet, à part Orgueil & Préjugés, lu quand j’étais au lycée, je n’en connaissais aucun autre. J’en avais entendu parler de certains plus que d’autres. Mansfield Park tombe dans cette dernière catégorie, et j’ai décidé de commencer par celui-ci.

La plume de Jane Austen m’a ravi d’un bout à l’autre de ce roman. Elle est pleine d’ironie et de piquant, surtout dans sa manière de décrire les mœurs des personnages. Elle n’y va pas par le dos de la cuillère quand elle évoque ou décrit leurs petits vices : la frivolité, l’avarice, l’oisiveté, la vanité… C’est un régal à lire. Jane Austen nous montre que l’intérêt unique des personnes de la classe supérieure britannique est de faire le mariage le plus convenable possible.

Au départ, j’ai eu du mal à accrocher avec le personnage de Fanny Price. Les choses se sont arrangées par la suite. Mais, dans les premiers chapitres, je l’ai trouvé très effacée, trop vertueuse. Elle m’a semblé insipide. Elle est complètement submergée par ses cousines qui prennent toute la place et qui sont plus bruyantes. Elle commence à s’affirmer quand Maria se marie et Julia part avec elle. Fanny Price reste seule avec Lady Bertam et Madame Norris, elle devient alors le centre d’intérêt principal. Elle se fait une place et elle montre ses préférences. Elle se révèle, au fil des chapitres, attachante, douce, calme et posée. Elle donne tout à sa famille, alors qu’elle ne la mérite absolument pas. Malgré tout, c’est un personnage qui n’est pas un coup de cœur, elle manque de pétillant ou de réparti à mon goût.

Toutefois, la manière dont ses tantes, Lady Bertam et Madame Norris, traite cette pauvre Fanny m’a totalement révoltée et je ne comprends pas pourquoi la jeune fille ne s’est pas, de temps en temps, révoltée. Elle semble être leur esclave et elles justifient cet état de fait par la générosité dont elles ont fait preuve envers elle, en lui offrant une éducation. Je crois que la pire des deux tantes a été Madame Norris, que j’ai trouvé détestable et méchante. Bien plus que Lady Bertam, qui fait plus preuve d’indolence que de méchanceté. Cette première la rabaisse constamment avec des remarques qui sont parfois d’une violence… Le statut social est au cœur de l’intrigue.

Un autre personnage que j’ai profondément trouvé antipathique est Henry Crawford. Je suivais totalement l’intuition de Fanny Price à son sujet. Son comportement m’a tout de suite semblé suspicieux, surtout son intérêt soudain pour la jeune femme. Il est souvent évoqué comme un séducteur. Il se joue de Fanny Price et de sa morale. C’est le personnage que j’ai adoré détesté avec sa vanité et son arrogance, son assurance. J’avoue que j’ai attendu avec impatience sa déchéance… Il forme un véritable antagonisme avec Edmond, qui, par son caractère, ressemble plus à sa cousine. Il est aussi effacé qu’elle, par rapport à son frère. Il a aussi une certaine fadeur avec des idées morales très arrêtées qui ressemblent à celle de Fanny. Ils sont littéralement faits l’un pour l’autre. Tout au long du roman, j’ai espéré qu’ils finissent ensemble, même si, pendant une bonne partie de l’intrigue, il semble plutôt la considérer comme une petite sœur qu’il doit guider sur le bon chemin.

Mansfield Park n’est pas le coup de cœur que j’escomptais pour un Jane Austen. Il y a plusieurs points qui ne m’ont pas charmé. J’en ai déjà évoqué : la galerie des personnages qui ne m’a parfois pas convaincu, par exemple. Fanny est sympathique, mais pas mémorable. Les personnages masculins manquent cruellement de charisme, on est loin d’un Monsieur Darcy. Il y a aussi quelques longueurs, surtout au début. La fin vient à temps et elle est tout de même un brin précipitée par rapport au reste. Certains éléments du dénouement allaient dans le sens que je souhaitais. Les événements se basculent rapidement, parfois de manière étonnante. Par ailleurs, je m’attendais à au moins une déclaration enflammée.

J’ai commencé par celui-ci, car c’est celui que je connaissais le moins. Cependant, je ne suis pas sûre que ça soit le meilleur choix. Même s’il se laisse lire, je n’en garde pas un souvenir impérissable. J’ai été tout de même soulagée de voir la fin approchée. J’ai quand même continué depuis ma lecture de celui-ci avec Emma, qui a été sans plus et dont j’essaie de rédiger l’article depuis un moment, et Raison & Sentiments que j’ai commencé cinq fois et abandonné. Je n’y arrivais décidément pas.